Le marché des piles sous tension : les effets d’une moindre consommation

Le marché des piles traverse une période de turbulence marquée par une baisse de la consommation. En 2025, les chiffres révèlent un recul de 2,1 % du chiffre d’affaires, tombant à 350 millions d’euros en France, tandis que les volumes chutent de 2,6 %. Cette tendance s’explique par des arbitrages budgétaires des ménages, qui réduisent leurs achats d’appareils nécessitant des piles, mais aussi par la montée des marques de distributeurs (MDD) et un manque de visibilité en magasin. Dans ce contexte, les acteurs historiques comme Duracell, Energizer ou Varta doivent repenser leurs stratégies pour s’adapter à un marché en mutation.

Un marché en recul, entre stocks et changements structurels

1. La baisse de la consommation : un phénomène durable

Les ventes de piles sont directement liées à celles des équipements domestiques et électroniques, eux-mêmes en recul pour la troisième année consécutive. Selon NielsenIQ et GfK, les Français reportent leurs achats d’appareils gourmands en piles (jouets, gadgets, outils), préférant utiliser leurs stocks existants ou se tourner vers des alternatives rechargeables.

Arnaud Soury-Lavergne, directeur marketing chez Duracell France, souligne : « Il n’y a pas un effondrement du marché, mais les consommateurs ont moins acheté de produits nécessitant des piles et avaient sans doute des réserves. ».

2. La montée en puissance des MDD et le poids du discount

Les marques de distributeurs (MDD) grignotent des parts de marché, représentant désormais 29 % des ventes en valeur (et 51 % en volume). Leur argument principal ? Le prix. Les discounters, bien que minoritaires (8,5 % du marché), progressent de 1,3 point en un an, attirant des clients sensibles au rapport qualité-prix.

Pourtant, paradoxalement, certaines MDD perdent du terrain (-0,3 point), signe que les consommateurs privilégient encore la fiabilité des marques nationales lorsque le besoin se fait sentir.

3. Un problème de visibilité en rayon

Un autre défi majeur réside dans la disposition des piles en magasinKarine Peretti (Energizer) explique : « Seuls 10 % des clients d’un hypermarché passent devant le rayon piles, généralement situé en zone froide. » Les enseignes qui multiplient les présentations sur le parcours client augmentent leurs ventes jusqu’à 2,5 fois.

Manon Avit (Energizer) ajoute : « Le moteur des ventes, c’est la visibilité. » Une stratégie que Duracell applique via des partenariats sportifs (comme avec l’écurie Williams en F1) et des opérations promotionnelles en points de vente.

4. Le déclin des piles alcalines et l’essor des piles spéciales

Les piles alcalines, autrefois incontournables (72 % des ventes), reculent (-5,7 % en valeur, -6,6 % en volume). À l’inverse, les piles bouton (spéciales) progressent fortement (+6 % en valeur, +13,4 % en volume), tirées par les montres connectées et les petits appareils électroniques.

Les piles rechargeables, en revanche, souffrent (-14,9 % en valeur, -26,4 % en volume), peut-être en raison d’un manque d’éducation des consommateurs sur leur rentabilité à long terme.

5. Innovations et durabilité : des leviers pour relancer le marché

Face à cette baisse, les marques misent sur :

  • L’innovation technologique (ex. : la gamme PowerBoost de Duracell pour une meilleure longévité).
  • La sécurité (ex. : piles bouton avec goût amer pour éviter l’ingestion par les enfants).
  • L’économie circulaire, avec un taux de recyclage en hausse (6 200 tonnes collectées en 2023 par Screlec).

Un marché en quête de renouveau

Le marché des piles est à un tournant. Si la baisse de la consommation et la concurrence des MDD pèsent sur les ventes, des opportunités existent. Les marques historiques doivent renforcer leur visibilité en magasinéduquer les consommateurs sur l’intérêt des piles rechargeables et innover pour répondre aux attentes en matière de durabilité.

Par ailleurs, l’essor des piles spécialisées (bouton, lithium) montre que des niches peuvent compenser le recul des produits traditionnels. Enfin, la sensibilisation au recyclage et les avancées technologiques (comme les batteries alcalines sans mercure) pourraient redynamiser le secteur.

À long terme, le marché devra s’adapter aux nouveaux modes de consommation, où l’écologie et l’efficacité énergétique joueront un rôle clé. Les acteurs qui sauront combiner performance, prix et responsabilité environnementale seront ceux qui tireront leur épingle du jeu dans ce paysage en mutation.

Retour en haut